Jour terriblement beau
Jour terriblement beau
published in:
– Ratschlag zum Verzehr der Seidenraupe
– Süddeutsche Zeitung, 28+29/4/01; Jahrbuch der Lyrik 2002. Hg. Ch. Buchwald/A. Endler. 2001; enth. in: Das Schweigen am andern Ende des Rüssels; in veränd. Fass. enth. in: Ratschlag zum Verzehr der Seidenraupe, Sämtliche Gedichte 2017-1987; Wiederabdr. in: Konradsblatt, 7/9/03; Rainer Groothuis: Wege am Meer 2003 (Kalender). Köln (Dumont) 2002; Steffen Jacobs (Hg.): Die liebenden Deutschen. Frankfurt (Haffmans bei Zweitausendeins) 2006; Fundsachen/Radio Bremen, 6/1/13; ; Dirk von Petersdorff (Hg.): Der ewige Brunnen. München: C.H.Beck 2023.
Il y a quelques îles face à la côte
de North Carolina, une série de bancs de sable, pas
beaucoup plus larges que la route, cependant
longs de presque deux cents milles ! rien
que des phares, des dunes et de l’herbe gris-jaune
et des mouettes, naturellement, avec des têtes blanches
et noires
Maintenant imagine-toi un peu, comment je
suis assis dans ma Chevrolet vert scintillant
roulant comme ça assez super décontracté à travers la mer :
L’homme à la radio passe la musique qu’il faut,
l’aircondition ronronne tout doucement en cadence, même la
vitesse, je l’ai réglée au volant,
au fond je n’ai plus qu’à
écarquiller les yeux et les oreilles
Tu comprends,
le monde s’est en ce jour,
je ne veux vraiment pas me plaindre,
s’est diablement appliqué pour moi :
tant de vagues, tant d’espace vide au-dessus,
tant de vent doux et … pourtant !
Quand je serai bientôt de retour à la maison
( dans une, deux semaines, peut-être trois ),
alors il n’y aura personne qui
partagera mon souvenir de ce jour quasi-parfait.
« Ah, intéressant » , m’accordera-t-on dans le meilleur des cas
en acquiesçant d’un hochement de tête, « une sorte de Sylt
à l’américaine » …
Mais tu sais,
ce jour-là sur la route, dans la mer,
il n’était pas intéressant –
il était plutôt si beau,
que j’en aurais presque pleuré à chaudes larmes
du haut de mes quarante-quatre ans,
parce que le savais bien,
parce que je savais à chaque seconde
que le reste de ma vie
je serais condamné à rester sacrément seul avec
tous ces phares, les mouettes, les vagues,
avec tous les brownies que j’ai mangés à cette occasion,
les canettes que j’ai vidées là-bas
: dans mon énorme Chevrolet scintillante
en ce jour terriblement beau